Petite mise au point sur le paracétamol.

Suite à l’étude de Connanghan PG et Robert E publié dans BMJ – largement relayée par nos médias en début de mois- et à de nombreuses interrogations de patients, il m’a semblé nécessaire de faire un point sur le paracétamol.

Que dit l’étude? (En terme simple…)

L’étude met en avant des potentielles toxicités cardiaques, gastriques et rénales,  du paracétamol.

Que faut il en penser?

Rien!!! ou presque!

Pourquoi

En résumé:

  • Le paracétamol reste et restera l’antalgique ayant le moins d’effets indésirables.
  • Des reproches sur la qualité de l’étude limitent ses conclusions.

 

En détaillé:

Les Dr Connanghan PG et Robert E ont réalisé une meta-analyse ( c’est a dire une analyse de plusieurs études déjà publiées). Ce type d’étude est important car, bien menée, elles ont un niveau de preuve qu’un simple étude ne pourrait pourrait apporter.

Mais cette meta-analyse a trop de biais que je vais tenter d’exposer simplement:

1) Connanghan PG et Robert E ont référencé 1900 études traitant de la toxicité du paracétamol, mais n’en ont retenu que 8, les autres n’étant pas été retenues pour diverses raisons ( absence de méthodologie, divers biais dans l’étude) . Faire une méta-analyse avec uniquement 8 études limite grandement l’intérêt de l’étude ( avec 20 études, on commence à peine à avoir quelque chose de statistiquement valable,  chaque étude n’étudiant pas nécessairement la même chose…)

2 ) Les risques identifiés par la méta-analyse sont ceux des anti-inflammatoires (toxicité gastrique, rénale et cardiaque) , mais la méta-analyse n’a pas pris soin d’étudier leur potentielle prise concomitante (leur association est fréquente et d’ailleurs recommandée pour certaines indications)

Le mécanisme d’action du paracétamol est le même que ceux des anti-inflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène, naproxene, ketoprofène) : il inhibe la même enzyme (la COX) mais est incapable de diffuser dans une zone inflammatoire à doses thérapeutiques. Il serait donc logique de retrouver les même toxicités, mais cela ne s’est jamais retrouvé en pratique.

3) La meta-analyse parle d’un éventuel sur-risque, et non pas d’un risque, sans être capable de le quantifier. Autant ne rien dire…

Que doit on en penser?

Cette méta-analyse a plusieurs biais ( absence de quantification des prises d’anti-inflammatoires, un nombre très faible d’études)  ce qui limite son interprétation, ce que les rédacteurs ne nient pas.

En attendant une étude de plus grande ampleur qui serait statistiquement valable, on ne change pas ses bonnes habitudes :

  • La dose maximale de paracétamol est de 1g toutes les 6 heures chez l’adulte. (Pour les enfants, je vous renvoie vers un de mes articles précédant)
  • Il s’agit d’un antalgique et non d’un antibiotique: la prise systématique est à proscrire par défaut, il faut en prendre et renouveler la prise uniquement si besoin.

Une douleur aiguë comme chronique doit être traitée : l’absence de traitement de la douleur entraine plus de risques ( dépression, perte de mobilité…) que son traitement.

Cette étude a eu au moins un effet positif: rappeler à tous et à tous que même l’anodin Doliprane qui traine dans la cuisine est un médicament!!

Un médicament n’est pas anodin, il ne doit pas se prendre par plaisir, mais par besoin!

Un médicament aura toujours – même si elles sont limitées – des toxicités, et pour la douleur, le paracétamol est celui qui en à le moins.

Dr Cédric Boucherat

Pharmacien Adjoint.

 

 

 

 

A propos Cédric Boucherat 707 Articles
Docteur en pharmacie Pharmacien adjoint à la pharmacie du Cora DU orthopédie - podologie DU Gérontologie Pharmacie clinique DU Pharmacie clinique oncologique